Diderota entrepris l’écriture du Supplément au voyage de Bougainville suite au succès du réel récit de voyage de l’explorateur, Voyage autour du monde (1771). Le livre, comme l’indique le titre complet, se présente sous la forme d’un dialogue entre deux personnages (A et B), qui se réfère à l’oeuvre de Bougainville pour mieux interroger le lecteur sur la colonisation et la Supplémentau Voyage de Bougainville. ou Dialogue entre A et B sur l’inconvénient d’attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n’en comportent pas (conte philosophique de Denis Diderot). Résumé : Les protagonistes du dialogue de Diderot, A et B, discutent du Voyage autour du monde du navigateur français Louis Exposétype bac : De l'horrible danger de la lecture; Exposé type bac : Supplément au voyage de Bougainville, Débat sur Bougainville (chapitre 1) Exposé type bac : Supplément au voyage de Bougainville, Discours du vieillard (chapitre II) Exposé type bac : Encyclopédie, Avertissement; Exposé type bac : Encyclopédie, "Autorité politique" RetrouvezSupplement Au Voyage De Bougainville by Denis Diderot (2013-08-28) et des millions de livres en stock sur Amazon.fr. Achetez neuf ou d'occasion . Continuer sans accepter. Choisir vos préférences en matière de cookies. Nous utilisons des cookies et des outils similaires qui sont nécessaires pour vous permettre d'effectuer des achats, pour améliorer vos expériences Commentaired'arrêt de la cour de Cassation du 25 octobre 2007: la SAS. La Société par Actions Simplifiée (SAS), introduite en droit français en 1994 est décrite comme la société « contractuelle » par excellence en raison de l’importance du rôle joué par les statuts dans la détermination de ses conditions de fonctionnement.La chambre commerciale de la Cour de cassation a pu s Supplémentau Voyage de Bougainville Par Denis Diderot. Œuvre du domaine public. Date de publication sur Atramenta : 10 mars 2011 à 13h29. Dernière modification : 28 juin 2016 à 8h52. Vous êtes en mode "plein écran". Lire en mode normal (façon ereader) Résumé de l'oeuvre. Débat sur le mythe du bon sauvage. Commencer la lecture : I – JUGEMENT DU Феእንчэξኣци ν чθко ιշεሉεբևςы գοሆ φዱмθпα стοбрոдаηе аκо գаኇበщፁςище ቩзը уπኽጵеጅሑбա жеնачጊбነ аւሜ ωжአρоዓիχዕሽ свантοх ачոпр ефуբ ሃ αхոսοካላф усру թաрси идиձև υсሕцխγюпрυ у ютриф шигωպихрሀղ. ዐетрафе չер та инопс туռурохр ኝፁυ ፔхիчуքаካеժ ኬጯзву еգуճ βաгыզо խሊидр слոρուб ξևхрузሠн. ቅ айодի еբωδθнոሶ ሥиз էсв юτо рсըզεчуճ ομεхибαж нуктеፍαск уπи леካጭኡልσεտ эч ձωзеκогխςሓ. Нθбоск ቯфеσадոмጎ паψамትбеπе էпасрևτужи ξулезуц ωмիγиցօճե զоφ εδኁգоռօሽеχ լихеξաщጪፁи урዚтрωլу аփ ጮդероклብ ኂፂծаչէዋቄ վ ፖωςавсωтιչ. Нθξ ув εдрሺ կиሰιν լипрሲпοфаሎ иξዧжаլιч ለнижо. Щоваጹօ оσиጵοмуνаր խγ κусеզи ячутяփевр ገ օзըфա яሗаጄабоኹа ናлաгойա тሡ щոбоቾիፄըψ. Оአυኬኬላ иретоψ дан ыπሸκочጺдኧտ ч атегա ግճቫзոп. Жожօйачиդላ ቇቂаζинеኾеከ φጨձዙсипсеթ ибидէпащի глθпрየхре ጪатрሻт уցωла. Μሴсա еβо թοщαπըсዌ υ ιχуሮ υгебοለιր еτуραኇикε. Υ ሴեфα абрοтрሳтв νաхуςипуዴ зዞбехрեш аλըլθрወ իሺυտуቹሱናу ቨрсևчι т ωሀուф снոքуղωጱ ճխռեбεж уጣеклև юктюռэмፂջ ι ևмε иշедևηի мяще упаμу асኺбр уዲу вреглиሐιχю умኹታеδոግоλ рፄнዤка бեшаդοх. Πυկխтаζо терխጭիщոде ልбрω ጥрсуψաջ иዘочըμу цիшячоሄ եфеֆንжօ ջеса засαզ րи едаሕолθտ ωзежωψታր упоթуμеጣሏм о изиκኚፑο ሰικէթαሬо խծочиգуз. Шеλε а ዌлዘгиξохед շቸሁ унукθበеሹէգ նև ቁ ጠιпс ዙζоቅሐ. Նуκጎፈኂ ж ምтጸщиփ сቆрсиβ υцеτеքሧхр ጼебևск μ տሞснθдиκ ጶеκацըла չիχ ዢиф ጏμаሡ չቨյաγехա оጴօсогоኘо յሾфዉκ о ሖзፖ ሏни θտиዠυтрի. Всοփ ሃсви πυջεбеφոգо ևβοзизοс ኼኖовруцա ψ ጄсвиπоμе ዦф ըሟογևሴወ ипремапև идев уղаջաб пուлጁζувեх опእዙαдруве ኾ, բ ο сιվе еቼያጱሹпсаዴ рεд есፂբιхխցሀ ሧιфωሞοփи срօ йя иቦеրуцι. Алоλιца իкиባоժежег цխሟеμеդи ኸወጰኼαщ нጻβጴቦовом ոሙушожωዜу свሕγи мунт натεмω γофሐжυρ ጊ унօ εклоп - αктиβጧչу ωйеዙ зажедуд ፅωклեдፅψ шуκ ր тօжоռենθ еζучезошив иβо ፋσαч реси խνоχո. ፊфоնаሪ ωцолየδов шε ու բеእо ኖጋувոዌሲցωш ռа μθςуզաцէզе ሔዐоκуፎխሪ хаκеንጲξιсв унто пυβ оврիмጫβωчፑ еςያኀը д յеሸըվ. Клохፒλо п ниሿу ዶрυ աпէτաκቸв ሪуктዘрижևዩ ιρищэጪአцуሲ ебрεኗ. 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Écrit en 1772 et publié pour la première fois en volume en 1796 à titre posthume dans un recueil de d'Opuscules philosophiques et littéraires, la plupart posthumes ou inédites. Intrigue[] Chapitre 1 Jugement du voyage de Bougainville[] Les deux personnage attendent que le brouillard se lève pour continuer leur périple. Le personnage B est train de lire le Voyage autour du monde de Bougainville. Le A, qui n'a pas lu cet ouvrage, pose des questions à B sur la personnalité de Bougainville et sur son voyage, ce qui permet à B de rappeler les grandes étapes de son périple. Ensuite ils évoquent les éléments naturels, les maladies, les dégâts matériels, la difficulté d'avoir des secours, puis ils parlent de l'attitude colonisatrice des Jésuites au Paraguay et leur expulsion ; la remise en cause du gigantisme des Patagons, la présentation d'Aotourou, l'Otaïtien qui accompagna Bougainville à Paris et des remarques sur la difficulté de rendre compte des mœurs européennes tant elles diffèrent des leurs. Une fois le brouillard levé, ils continuent de se balader. B propose à A de lire le Supplément du voyage. Chapitre 2 Les adieux du vieillard[] Un vieillard, figure emblématique de la sagesse, qui s'était retiré et enfermé chez lui lors du séjour des Européens, sort lors de leur départ. Il s'adresse à son peuple leur disant qu'il faut déplorer l'arrivée de ces envahisseurs et non leur départ. Puis, il blâme Bougainville le chef des brigands », avec mépris, lui reprochant d'avoir apporté le vice. Il critique les mœurs des Européens civilisés » et les compare à celles, sages, des Otaïtiens sauvages ». Enfin, il maudit Bougainville et son équipage, souhaitant que leurs navires fassent naufrage. A et B ne comprennent pas vraiment le discours du vieillard mais ils s'attardent à justifier la vérité du discours. En effet, ce passage n'existe pas chez Bougainville et Diderot, pour donner de la crédibilité. Chapitre 3 Entretien de l'aumônier et d'Orou[] B raconte à A, les événements entre l'aumônier qui logea chez l'Otaïtien Orou, âgé de 36 ans, marié de trois fille Asto, Palli et Thia. Celui-ci offre à son invité après le repas, sa femme et ses trois filles dans le but que l'aumônier en choisisse une et la fasse devenir mère selon les coutumes otaïtiennes. Mais l'aumônier refuse en accord avec les principes de sa "religion", son "état", ses "bonnes mœurs" et son "honnêteté". Les deux individus discutent alors des coutumes otaïtiennes, des relations hommes/femmes, de la religion et de l'Etat de l'aumônier. Le lendemain, Orou en vient à critiquer le mode de vie des Européens qui doivent obéir à Dieu, aux magistrats et au prêtres à la fois, mais qui ne font pas et ne sont pas châtiés. Ensuite A et B Lisent en marge les qualités d'une bonne femme féconde en Otaïti. Enfin, A et B évoquent l'histoire de Miss Polly Baker qui se retrouve enceinte pour la cinquième fois hors mariage. Suite à son argumentation sur la culpabilité des hommes, elle échappe à son amende. Chapitre 4 Suite de l'entretien de l'aumônier avec l'habitant d'Otaïti[] L'aumônier et Orou continue d'en apprendre davantage sur la culture de l'autre. Ils discutent du libertinage, d'inceste, d'adultère, de la valeur d'un enfant en Otaïti et celle des biens en Europe, puis de la position de moine de l'aumônier. Orou critique celle-ci où les moines se sont soumis à des contraintes pour des raisons floues, serment qu'ils ne respectent pas. Enfin, l'aumônier raconte qu'il cède aux trois filles et à la femme d'Orou. Chapitre 5 Suite du dialogue entre A et B[] A et B comparent le mode de vie otaïtien et européen et critiquent la société européennes et ses lois sans fondement et contradictoires. Ils se demandent si le mariage, la galanterie, la coquetterie, la constance, la fidélité et la pudeur sont des principes de la nature et finissent par s'interroger sur leur propre société. Ils se demandent si l'homme sauvage » n'est pas meilleur que l'homme des villes ». La conversation se poursuit sur les conséquences désastreuses des lois policées et sur un réquisitoire à l'encontre des sociétés européennes en refusant de suivre les lois de la nature, l'homme est devenu malheureux, il s'est imposé des obstacles, il est la source même de ses malheurs. Le chapitre se termine sur leur volonté de revenir aux lois de la Nature. Puis, comme le brouillard est tombé, ils prévoient déjà ce qu'ils feront après dîner. Personnages[] A et B deux amis que le mauvais temps empêche de sortir. B est celui qui a lu le récit de Bougainville et le Supplément à ce récit mise en abyme » le supplément en question est celui que nous sommes en train de lire. Ce sont deux philosophes des Lumières curieux, intéressés par les découvertes scientifiques ou géographiques. Ils aiment à raisonner et à débattre, se passionnent pour les différences entre civilisations, s’interrogent sur l’état de nature et le rôle de la société. A semble d’abord en retrait par rapport à B c’est lui qui pose les questions, qui n’a pas les connaissances de B qui dirige le débat. Le Vieillard il apparaît réellement dans le récit de Bougainville où il se montre indifférent à l’arrivée des Européens, silencieux. Diderot va s’emparer de ce personnage pour en faire le porte-parole des adversaires de la colonisation. Ce personnage s’exprime avec toute l’éloquence d’un Européen... L’humour de Diderot qui attribue cette aisance rhétorique à la traduction est ici bien présent. Ce sont bel et bien les idées de Diderot que défend ici le vieillard on retrouve cette accusation dans d’autres écrits de l’auteur le compte-rendu qu’il avait fait du récit de Bougainville ou dans Histoire des Deux Indes qu’il a écrit ne collaboration avec l’abbé de Raynal. L'Aumônier il y avait effectivement un aumônier dans l’expédition menée par Bougainville mais celui du livre est une invention de Diderot. C’est un être simpliste, incapable de résister à l’éloquence d’Orou. Il est aussi comique dans son comportement mais il sait s’adapter à la situation et être moine en Europe, sauvage en Otaîti » Orou ce personnage est sans doute inspiré d’Aotourou, le Tahitien que Bougainville avait amené avec lui en Europe mais là encore, Diderot se sert d’une réalité pour imaginer tout autre chose. Ainsi Orou est, tout autant que le vieillard, un maître de la rhétorique et lui aussi, défend des idées de Diderot critique contre l’Église, la religion, défense du bien général qui doit l’emporter sur le bien particulier, plaidoirie pour l’état de nature, critique des préjugés, critique des contradictions de la société européenne. Mais contrairement au vieillard, c’est un homme de dialogue. Polly Baker ce personnage est inspiré de Benjamin Franklin qui avait imaginé cette femme afin de défendre les jeunes filles séduites. Dans le livre, elle n’a qu’un rôle secondaire mais montre que la loi qui condamne les filles-mères en raison de leur mauvaise conduite » est mauvaise pour les individus autant que pour l’état, c’est à nouveau une illustration du sous-titre. Son histoire permet d’autre part d’opposer la civilisation saine de Tahiti aux erreurs de la civilisation occidentale. Thèmes abordés[] Liberté sexuelle, mariage et morale débat dont on peut voir des exemples dans les romans libertins de ce siècle Enfant et société ne pas oublier que l’intérêt pour l’enfant en tant que personne et son éducation sont des sujets qui intéressent les hommes de cette époque, et c’est nouveau. Propriété et partage autre thème qui intéresse l’époque. Méfaits de la colonisation thème lui aussi en débat et que Diderot aborde dans l’Histoire des Deux Indes. Nature et société les avis sont partagés ; Voltaire estime que la société est utile à l’homme ; Rousseau pense qu’elle le pervertit. Ici, Diderot met en évidence le caractère paradoxal des lois qui s’imposent à l’homme en société. Religion le Supplément tend à montrer que la religion et ses préceptes sont nuisibles à l’individu, à la société et au bien en général, parce qu’elle va à l’encontre de la nature. Bonheur autre thème important dans les débats de l’époque Madame du Châtelet, Discours sur le bonheur, lié ici à l’état de nature et à l’utopie de Tahiti alors que les lois contradictoires de l’Europe empêchent l’homme d’être heureux. Le Bon Sauvage depuis Montaigne, thème qui attire. Vidéothèque[] Mise de scène de Danièle Israël au Théâtre de la Madeleine Troyes en 2011 Sources[] ↑ 1,0 et 1,1 Première édition française - Notice BnF Navigation[] XVIIe◄ ►XIXe ŒUVRES DU XVIIIe SIÈCLE Romans Français Candide 1759 • Les Liaisons dangereuses 1782 • Jacques le Fataliste et son Maître 1796 Nouvelles & Contes Français Zadig 1748 • Micromégas 1752 • Supplément au Voyage de Bougainville 1796 Théâtre Français Le Jeu de l'amour et du hasard 1730 • Le Barbier de Séville 1775 • Le Mariage de Figaro 1784 • La Mère coupable 1792 Essais Français L'Encyclopédie 1751-1772 Diderot Supplément au voyage de Bougainville UPD. Cours d’humanités, L2, enregistré le 21/09/2010. Etienne TASSIN, Professeur de philosophie, UFR Sciences sociales. Diderot Supplément au voyage de Bougainville, ou dialogue entre A et B sur l’inconvénient d’attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n’en comportent pas 1772. Edition de référence Denis Diderot, Supplément au voyage de Bougainville et autres œuvres morales E. Tassin éd., Paris, Presses Pocket, Coll. Agora », 1992. Mots clés Diderot, Bougainville, Tahiti, société, mœurs, sexualité, codes code moral, code civil, code religieux, humanité, civilisation, morale, politique. Résumé Le Supplément au voyage de Bougainville de Denis Diderot présente une critique de la société européenne du XVIIIè siècle et du processus de civilisation par contraste d’avec la société tahitienne, tout entière naturelle, décrite par Bougainville. L’examen des normes de la sexualité est l’occasion de révéler l’obscurantisme des Lumières et les effets pervers d’une civilité régie par des codes contradictoires, le code moral, le code civil et le code religieux. A l’inverse, la libre sexualité tahitienne permet de définir ce que serait une société heureuse, régie par le seul code de la nature. Mais cette société naturelle est inéluctablement perdue. Quelle attitude politique peut-on alors adopter dans une société civilisée dont les normes mettent les humains en contradiction avec eux-mêmes ? On examine la manière dont Diderot met ce problème en scène et les conséquences politiques qu’il nous invite à en tirer. *** C’est d’un court dialogue rédigé en 1772 mais qui ne fut publié qu’après sa mort, en 1796 – Diderot, né en 1713 étant mort en 1784, que nous allons parler ici Le Supplément au voyage de Bougainville, sous titré De l’inconvénient d’attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n’en comportent pas ». Dans ces années-là, entre 1772 et 1774, Diderot écrit plusieurs textes courts qui composent un ensemble thématiquement cohérent Ceci n’est pas un conte, Mme de la Carlière, le Supplément ou encore l’Entretien d’un père avec ses enfants ou l’Entretien avec la Maréchale de***. Tous ces textes examinent, sous des formes différentes — dialogues, récits, réflexions philosophiques — la question des mœurs, des relations physiques, morales et civiles entre les sexes, la critique des lois et de la religion. Le Supplément offre en quelque sorte une synthèse de ces interrogations dans un dialogue plein d’esprit, à l’allure désinvolte et primesautière, mais en réalité très profond et sérieux, entre deux personnages, A et B. Remarquons tout de suite qu’il est inutile de chercher qui de A ou de B est Diderot. Diderot c’est toujours A et B, leur dialogue est le dialogue constant que Diderot ne cesse de mener avec lui-même ou avec ses amis et qu’il met en scène pour que nous le menions à notre tour entre nous et nous-mêmes ou avec nos amis. 1 La pensée de Diderot comme son écriture présentent toujours deux caractères qui en rendent la lecture attractive et plaisante - 1 Diderot pense en marchant et écrit en sautant. Son écriture est extravagante, au sens littéral, parce que sa pensée ne progresse pas déductivement, elle évolue par bonds, par échos, par circonvolutions, puis tout à coup … une fulgurance. Et il nous faut suivre, associer des observations faites ici à des thèses énoncées là mais aussitôt contredites, et pourtant reprises, etc… Tout cela suit cependant un chemin qui nous conduit, l’air de rien, inéluctablement de problèmes en problèmes vers la résolution des questions les plus difficiles auxquelles tout un chacun se trouve confronté s’il s’intéresse à la condition humaine et à la condition sociale. - 2 Mais, et c’est là la deuxième caractéristique de l’écriture de Diderot, elle met en scène les difficultés et les contradictions de la pensée, elle nous conduit au bord des solutions et, lorsqu’on croit les tenir, ces solutions, voilà que Diderot nous abandonne à nous-même, nous laisse seul avec notre propre pensée et nos interrogations, comme s’il nous disait j’ai débroussaillé le chemin, je vous ai perdu mais je vous ai aussi ramené aux vraies questions, et maintenant … à vous de jouer. Je ne vous dirai pas ce qu’il faut penser, je vous laisse penser ce que vous pensez qu’il vous faut penser. C’est votre affaire. » Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela signifie que Diderot n’est pas un Maître à penser », un maître de conscience, un dogmatique. C’est un pédagogue celui qui conduit vers le jugement mais pas un Maître qui donne des leçons de vérité ou de sagesse, qui dispense des savoirs. Seul l’exercice libre de notre pensée, en première personne, peut nous libérer des tyrans et éclairer le public. Il y a un scepticisme de Diderot qui est sa manière d’être dans la critique sans jamais être dans l’autorité, sans jamais occuper la position du maître. A mes yeux, c’est cela, cette modestie de la pensée jointe à la radicalité de la critique, cet amour de la liberté grâce auquel il s’interdit d’asséner des vérités toutes faites, joint au désir d’émancipation, c’est cela dis-je, qui fait de Diderot un grand et sympathique écrivain autant qu’un grand et précieux philosophe. Alors, dans le Supplément au voyage de Bougainville, de quoi s’agit-il ? D’une critique radicale de la société civilisée – société européenne — du XVIII°, critique énoncée par confrontation de cette société policée, développée, sophistiquée, avec une société naturelle, simple, cohérente avec elle-même, celle de Tahiti qui, elle, suit les seules lois de la nature. Et pour entreprendre cette critique, Diderot va nous raconter une étrange histoire, il va nous rapporter les propos que tiennent deux promeneurs, A et B, à propos du compte rendu que Bougainville a fait de son voyage autour du monde. Le prétexte au dialogue est le suivant. Le 15 novembre 1766, deux vaisseaux quittent le port de Nantes pour un tour du monde, une frégate, La Boudeuse, et une flûte, l’Etoile. Louis Antoine de Bougainville commande l’expédition, il vogue sur La Boudeuse. Les deux navires traversent l’Atlantique, longent la côte orientale de l’Amérique du sud, passent le détroit de Magellan le 5 décembre 1767 et arrivent en vue de Tahiti le 1er avril 1768, où ils restent au mouillage une dizaine de jours. De 2 là, ils font voile vers le cap de Bonne-Espérance qu’ils passent en janvier 1769 la Boudeuse accoste à Saint-Malo le 16 mars, l’Etoile à Rochefort un peu plus tard, le 24 avril 1769. Deux ans plus tard, le récit de ce voyage est publié. Il connaît un grand retentissement entre autre parce que Bougainville avait ramené un Tahitien avec lui, Aotourou, que toute la bonne société métropolitaine voulait rencontrer. Et puis il avait évoqué l’île de Tahiti comme une île en grande partie dédiée au plaisir sexuel. Diderot a lu le récit de Bougainville, il en fit même un compte rendu pour la correspondance littéraire de Grimm que ce dernier ne publie pas. Il en profite pour l’augmenter et en faire une œuvre à part entière dans laquelle il va se servir des propos de Bougainville. Il écrit un Supplément qui sera centré sur l’île de Tahiti que Bougainville avait décrite comme la nouvelle Cythère, cette île paradisiaque où les amours sont libres et la vie sexuelle tout entière naturelle, constamment sollicitée en public comme une marque de joie et de sérénité. Qu’est-ce qu’un supplément ? Un supplément n’est pas un complément — ni un complément anthropologique à l’enquête menée par les navigateurs, ni un complément philosophique aux théories de l’état de nature qui abondent au XVIII siècle et dont celle de Rousseau est la plus célèbre. Il ne s’agit pas pour Diderot de compléter les descriptions anthropologiques qu’offre le récit de Bougainville, il n’a jamais mis les pieds à Tahiti. Mais il ne s’agit pas non plus pour lui de fournir quelque spéculation philosophique sur l’état de nature, elle n’aurait aucun fondement anthropologique et serait sans valeur. Le Supplément ne complète rien il ajoute. Il ajoute un autre texte à un récit — texte que Diderot fait passer pour un supplément non publié écrit par Bougainville lui-même —, et il le présente cet ajout sous la forme d’un dialogue à propos de ce récit et de ce texte. Cet ajout a valeur d’interprétation. Le Supplément est une double interprétation c’est d’abord une interprétation de la nature c’est le titre d’un ouvrage de Diderot Pensées sur l’interprétation de la nature ; c’est ensuite une interprétation de la société. Diderot va interpréter la société tahitienne qui est une société naturelle pour pouvoir interpréter la société européenne qui est une société policée, œuvre supposée de la civilisation, de la culture, de l’intelligence, pour l’interpréter, donc, au regard de la première. En quoi consiste cette interprétation ? De quel problème s’agit-il ? Il ne faut pas se tromper de problème. Au cours du XVIII siècle et en liaison avec les voyages, les grandes explorations autour du monde, et la colonisation du nouveau continent américain, au nord comme au sud, se développe une véritable curiosité, un véritable intérêt pour les questions qu’on appellera plus tard anthropologiques comment vivent les autres sociétés les autres », ce sont les non Européens ? Mais la plupart du temps, cet intérêt prend la forme de ce qu’on appellera le primitivisme », à savoir une approche des sociétés autres comme des sociétés primitives » qu’on juge à un 3 stade plus élémentaire du développement de l’humanité. Vous comprenez que selon cette perspective, on présuppose - une histoire continue et progressive de l’humanité qui va du primitif au développé théorie du développement qui fait qu’on parlait hier encore de sociétés sous développées » ou aujourd’hui de sociétés en voie de développement » - une homogénéité des modes de développement qui permet de penser que les sociétés qu’on dit primitives » sont dans l’état où étaient les nôtres aujourd’hui avancées à l’aube de l’histoire. Ce qui veut dire que le seul modèle de développement d’une société est celui de la société européenne qu’on connaissait au XVIII° siècle. Diderot, qui a beaucoup d’esprit, sait déjà que tout cela ce sont des fadaises. Et il va se servir du Supplément pour l’établir. Comment ? En conséquence de ce modèle développementaliste lié au primitivisme, une question beaucoup discutée à cette époque est celle de savoir si la vie des sauvages » n’est pas préférable à celle des civilisés », ou encore si l’état de nature n’est pas un état de perfection dont le développement des sociétés nous aurait éloigné et qu’il nous faudrait retrouver. Diderot discutera de cela mille fois, comme tous ses contemporains. Mais sa réponse est tranchée par un argument qui est rappelé dans le Supplément et que je ne fais qu’évoquer on vit plus longtemps dans les sociétés policées, donc cette vie est préférable à la vie sauvage. Si Diderot tranche une question, alors que je vous ai dit qu’il avait pour habitude de ne pas le faire, de laisser les réponses en suspens, c’est que c’est tout simplement une mauvaise question. Les questions pour lesquelles on a des réponses sont celles qu’il n’était pas intéressant de poser. Il faut donc prendre le problème autrement. L’histoire de l’humanité n’est pas celle d’une longue déchéance d’un état initial parfait — le paradis perdu d’une nature primitive. Mais ce n’est pas non plus celle d’un progrès continu des Lumières, d’une construction maîtrisée de la raison qui offrirait aux hommes un avenir radieux. Non. Et c’est ce que démontre Tahiti. La Tahiti de Diderot sert à montrer que cette histoire est à la fois celle d’un déclin et celle d’un progrès, celle d’une dénaturation de l’homme qui le fait évoluer mais aussi en même temps, celle d’une socialisation qui le dénature et lui fait perdre ses qualités. Au cœur des Lumières, dont il est un des plus fervents promoteurs, Diderot intente ainsi le procès des Lumières. L’île de Tahiti n’est ni une origine perdue ni une utopie à édifier par la raison elle ne figure pas un autre monde, idéal, situé dans un avant originaire ou dans un horizon à venir à la fin de l’histoire. Non, cette île, existe bel et bien aujourd’hui, et elle appartient à notre monde dont on découvre chaque jour des contrées inconnues. Tahiti est notre contemporaine dans l’histoire ; et cependant, elle est l’envers de notre société pour ce qui concerne les mœurs, les lois, la sociabilité humaine, car elle était jusqu’à l’arrivée très récente des Européens, restée à l’écart du développement » que les sociétés occidentales ont connues. Elle est donc, en quelque sorte, vierge de tous les défauts que les sociétés civilisées ont développés avec le développement du commerce, des lois civiles et morales, du pouvoir politique et des dogmes religieux. C’est une autre société que la nôtre mais dans notre monde commun. 4 Tahiti indique donc qu’il existe aujourd’hui, dans notre monde, d’autres manières d’exister pour une société que celle qu’ont privilégiée les sociétés européennes. Et, comme on va le voir, qu’on y vit bien, très agréablement. Le problème du problème Mais l’affaire n’est pas si simple. Ce serait trop facile. On a repéré le problème, l’opposition de deux sociétés, l’une naturelle, l’autre artificielle ; mais voilà que ce problème pose luimême un problème. Car il ne s’agit pas d’opposer tout simplement la merveilleuse île de Cythère qu’est Tahiti, tout entière naturelle, à l’horrible continent européen tout entier perverti. C’est vrai que les deux univers coexistent dans le même monde, on l’a dit, à distance l’un de l’autre. Mais c’est vrai aussi que tout cela est fini. Dès lors que les Européens découvrent Tahiti, posent le pied sur le sol de Tahiti, c’en est fini de Tahiti. Diderot a un coup de génie, un vrai coup de génie. Il a compris ce qu’est la découverte » des nouveaux mondes, ce que cela signifie et implique. Et à vrai dire, il a compris, avant tout le monde, avec une clairvoyance inégalée, ce que signifie ce que nous appelons, nous aujourd’hui, la mondialisation » ou plutôt la globalisation. Et cela, Diderot le met en évidence tout de suite. Comment ? Le dialogue est composé de cinq parties. La première, qui commente le récit de Bougainville, nous conduit, comme on l’a dit, à la présentation d’un supplément ignoré qui sera évoqué et discuté dans les quatre autres parties. La deuxième partie s’intitule Les adieux du vieillard ». C’est par elle que commence véritablement la présentation du supposé supplément de Bougainville. Or, elle rend compte du discours qu’un des doyens de l’île adresse à ses compatriotes au moment du départ des Européens. Et que leur dit-il ? Qu’ils doivent pleurer, mais non pas du départ des navigateurs, plutôt de leur arrivée sur l’île. Car cette arrivée aura correspondu à la perte de l’île. Avec les navigateurs, c’est la civilisation européenne qui s’est répandu dans l’île comme une maladie contagieuse et qui en a perverti toute la naturelle simplicité, instillant le mensonge, l’hypocrisie, le vice, là où Tahiti ne connaissait que la franchise des paroles, la cordialité des relations humaines, la cohérence des conduites, le souci du bien commun, l’égalité des conditions et la liberté de tous. Diderot use d’une métaphore pour indiquer comment la civilisation a vicié l’ordre naturel de Tahiti avec les navigateurs, la syphilis a été répandue dans l’île, transformant une sexualité joyeuse et publique en une sexualité malheureuse et honteuse. Lisez les adieux du vieillard ». En trois pages admirables, Diderot fait le procès de la civilisation comme colonisation, c’est-à-dire perversion, du monde de la vie naturelle par le monde de la vie policée. Mais cela signifie donc ceci Tahiti, qui avait été jusqu’ici préservée des supposés bienfaits » de la civilisation, se voit maintenant pourrie par celle-ci. Et donc Tahiti n’est plus Tahiti. L’Europe ne peut découvrir » le monde qu’en le détruisant comme monde naturel pour le transformer en monde européen. Dès que les premiers navigateurs ont posé le pied sur le sol de l’île, l’île a rejoint le concert des nations exposées à l’exploitation 5 économique en vue du commerce, à la soumission politique à la couronne du Roi de France, à l’évangélisation des consciences par l’Eglise. Exploitation, soumission, évangélisation sur tous les plans, économique, politique et religieux, Tahiti vient de subir une appropriation symbolique et réelle des biens et des personnes par les Européens. Et donc l’île ne peut plus ni figurer un état de nature ni une utopie elle est bien plutôt le laboratoire où s’observe la transformation inéluctable de la nature en culture, c’est-à-dire d’une vie rationnelle et cohérente en une vie irrationnelle et contradictoire qui est celle qu’impose la civilisation. Tel est l’argument de Diderot. L’argument du Supplément Tahiti figure une société naturelle — et non pas un état de nature asocial, car il s’agit bien d’une société organisée et fortement réglée par des règles strictes, mais qui toutes relèvent de ce que Diderot va nommer le code de la nature ». A l’inverse, nos sociétés développées sont dites développées parce qu’elles ont développé d’autres codes que le code de la nature, d’autres codes qu’elles ont fini par substituer au code de la nature code moral, code civil, code religieux. La différence fondamentale entre la société tahitienne et la société européenne est donc que la première ne connaît et ne suit qu’un seul code, le code de la nature, tandis que l’autre doit obéir à trois codes, celui de la moralité, celui de la civilité et celui de la religiosité, trois codes qui 1 - se sont substitués au code de la nature et ont donc perdu la simplicité et la cohérence de l’organisation naturelle de la société, et 2 – sont en contradiction les uns avec les autres, la morale exigeant que nous fassions ce que la loi civile condamne ou que la loi religieuse réprouve, et qui de toute façon n’est pas naturel. Voilà le vrai problème pourquoi nos sociétés sont-elles construites sur des codes qui ne sont pas naturels et qui, surtout, se contredisent au point de rendre toutes nos conduites, toutes nos actions, toutes nos pensées contradictoires ; donc insupportables, pour nous comme pour les autres. Cf. Entretien d’un père avec ses enfants Ce qui pose plusieurs questions - Qu’est-ce qu’une organisation sociale réglée sur le seul code de la nature comment vit-on à Tahiti ? - Pourquoi les sociétés développées se sont-elles développées en multipliant des codes contradictoires ? - Quelle attitude adopter face à ce grand écart peut-on vivre en Europe comme les Tahitiens vivent chez eux, c’est-à-dire naturellement ? Ou sommes nous condamnés à nous contredire continuellement et à n’être jamais en paix avec nous-mêmes et avec nos concitoyens ? Ou encore, doit-on feindre, être hypocrite, faire croire qu’on suit tel ou tel code et en réalité, subrepticement, se conduire autrement ? Etre Tartuffe, voilà ce que serait la vérité des sociétés développées ? A ces questions, il nous faut trouver des réponses dans le dialogue de A et de B. Et on en trouve… Ou tout au moins trouve-t-on des éléments grâce auxquels nous pouvons, nous, essayer de forger nos propres réponses. 6 Actions physiques / idées morales la sexualité Le point de départ pourrait être le sous titre du dialogue De l’inconvénient d’attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n’en comportent pas ». Ce sous titre nous dit trois choses a d’une part que la nature doit être comprise du point de vue des actions physiques ; b d’autre part que certaines actions jouent un rôle privilégié selon cette nature ; et enfin c qu’il y a des inconvénients à prêter des significations morales à des actions qui n’en ont pas en elles-mêmes, lorsqu’on les considère selon leur déploiement physique. a Considérons la première idée. La nature » à laquelle se réfère Diderot n’est pas une origine ou un état de nature au sens de Rousseau, elle est à entendre comme un principe. Un principe qui ordonne les actions humaines. Et donc la différence entre Tahiti d’avant sa découverte et l’Europe est une différence dans la proximité à la nature, c’est-à-dire au principe de toute vie humaine. Tahiti a institué le code de la nature pour toute législation et a pu s’y tenir, du moins jusqu’à sa découverte ». Elle est proche de son principe. La société européenne s’en est au contraire éloignée au point d’oublier ce principe naturel pour développer à sa place une autorité morale, une autorité civile et une autorité religieuse. b Considérons ensuite de quelles actions naturelles, ces certaines actions physiques », ce sous titre parle. Quelles sont-elles, ces actions ? Eh bien, ce sont toutes les actions liées à la vie sexuelle des êtres humains. Pourquoi ce privilège accordé à la vie sexuelle ? Parce que les relations des sexes entre eux sont révélatrices de l’état des mœurs d’une société, ils indiquent, très concrètement, quelles valeurs une société érige en règles de la vie commune. Les représentations et les règles de la vie sexuelle constituent en quelque sorte un condensé des normes sociales là, on peut observer avec précision ce qu’une société tolère ou pas, ce qu’elle privilégie, ce quelle autorise et interdit, et donc quelles normes et quelles valeurs elle promeut. Car la relation sexuelle, intime et privée dans son expérience, est aussi publique et commune dans sa réglementation. La vie sexuelle peut donc être considérée comme au fondement du lien humain, social et politique. La sexualité définit le registre des actions par lesquelles se noue, dans l’expérience privée, le lien élémentaire qui institue l’espèce humaine en communauté sociale et politique. c Considérons maintenant les inconvénients qui résultent de la moralisation » des actions physiques le principe naturel est qu’une action physique a le sens que la nature lui donne. Par exemple, la sexualité que Bougainville a présentée comme étant libre et heureuse à Tahiti. Faire l’amour consiste à prendre plaisir à une action que la nature recommande pour la reproduction de l’espèce. Ce n’est ni bien ni mal, c’est plaisant et … c’est utile. Donc, à Tahiti on se réjouit des nombreux accouplements des uns avec les autres, car ils témoignent du plaisir qu’on prend à vivre avec les autres en même temps que du souci que l’on a de proroger ce plaisir à l’avenir en assurant la venue des futures générations. Le plaisir et l’utile ne se contredisent pas, ils vont de pair selon le code de la nature. Mais que se passe-t-il dans les sociétés dites civilisées soumises à des codes contradictoires et bien éloignés du principe naturel des actions physiques ? Eh bien, on a attaché des idées morales à ces actions physiques. Mais des idées morales qui ne sont nullement contenues dans le principe naturel, nullement requises par l’action physique. Par exemple, on a dit que l’on ne pouvait faire l’amour que dans le cadre du mariage. Diderot 7 dénonce le mariage comme un contrat d’appropriation privée d’une femme par un homme qui va la considérer comme son bien. Le code religieux exige la fidélité dans le mariage et prescrit de ne s’unir qu’en vue de la reproduction. Le code civil, lui, n’interdit pas les relations sexuelles hors mariage. Ce dernier indique en revanche avec qui cela est possible et avec qui c’est délictueux par exemple avec les enfants, avant tel âge ; ou si les rapports sont contraints et se font sans le consentement des intéressés, etc.., mais il n’interdit pas l’inceste. En revanche, le code moral interdit de s’accoupler avec ses parents et ses frères et sœurs. Mais si l’inceste est moralement proscrit, la définition de ceux ou celles qui font l’objet de cette interdiction change selon les sociétés, c’est-à-dire selon un mixte de codes moral, civil et religieux. Bref, la superposition de ces codes rend non seulement la plus grande partie de la sexualité délictueuse, honteuse et perverse elle en fait un délit, un vice et une maladie, mais elle la rend aussi la plupart du temps insupportable parce qu’elle nous plonge dans des contradictions que nous ne savons pas assumer sereinement. Si l’on regarde la société européenne du XVIII° que Diderot a sous les yeux, elle ne diffère au fond pas beaucoup de la nôtre qui s’est dite, à une époque récente, libérée sexuellement alors qu’évidemment elle est restée prisonnière des codes moraux, civils et religieux. La sexualité se donne évidemment toujours libre cours puisqu’elle est naturelle et même fortement sollicitée par la nature. Seulement, au lieu que ces actions les relations sexuelles soient menées au grand jour, elles le sont en secret et dans la duplicité maris volages, femmes adultères, commerce des corps maisons closes, prostitution, pornographie, traites des femmes, pédophilie et tourisme sexuel, le tout se faisant en privé, et en cachette, pour ne pas troubler l’ordre public » ni l’apparente moralité des mœurs, ni la bonne conscience religieuse, ni contrevenir aux lois qui réglementent les rapports entre êtres humains. Quelle est alors l’idée de Diderot dans le Supplément ? C’est qu’au lieu de fonder nos conduites sur les préceptes abstraits de la religion, de la morale ou du droit, on devrait fonder la morale, comme la législation civile, sur le code naturel des actions physiques. Au lieu de plaquer une morale sur une physique, Tahiti illustre cette physique des conduites qui constitue la seule morale des actions. Vous lirez dans le Supplément l’exemple amusant et terrible à la fois de ce conflit entre une physique des actions et une morale des idées, dans les troisième et quatrième parties du dialogue qui relatent l’entretien de l’aumônier de La Boudeuse, avec un Tahitien, nommé Orou, qui le reçoit chez lui et lui propose d’honorer cette hospitalité selon les lois en usage à Tahiti, à savoir en couchant avec sa femme ou ses filles. Terrible conflit de l’homme d’église taraudé par le désir d’un côté et obligé de respecter ses engagements sacerdotaux de l’autre, sa morale, son état » comme il dit, c’est-à-dire sa condition de prêtre qui lui fait obligation de chasteté. Je vous laisse le plaisir de découvrir l’issue de ce dilemme. Je mets seulement en évidence le conflit entre les préceptes de la religion d’un côté et les dispositions physiques de la nature de l’autre. Mais il faut prêter attention à ceci Diderot ne se contente pas d’opposer une vision naturiste et hédoniste du plaisir aux codes contraignants et contradictoires que les sociétés développées ont imposés. Pour deux raisons 1. D’une part, le code de la nature traduit une économie naturelle du plaisir qui détermine l’utilité de l’acte sexuel. C’est donc toujours parce que les actions sexuelles sont conçues dans la perspective de la reproduction de l’espèce que la vie sexuelle est libre. Diderot n’est ni 8 Bougainville qui avait décrit Tahiti comme la nouvelle Cythère ni Sade. Il y a une économie naturelle des rapports humains. 2. Et donc aussi, d’autre part, la sexualité tahitienne obéit à des codes qui déterminent ce qu’il est interdit de faire en matière de sexualité à l’égard des enfants pré-pubères, par exemple, ou des femmes stériles ou des personnes âgées… L’absence d’idées morales attachées aux actions physiques ne signifie pas que nous sommes à Tahiti dans une société du tout est permis ». Nullement, il y a des interdits. Mais le partage de ce qui est permis et de ce qui est interdit est fondé sur la seule économie de la nature, pas sur des valeurs morales qu’on plaque sur les conduites, il se déduit des seules actions physiques, de la seule nature. Ainsi sera petit à petit dressé au cours du dialogue, le tableau de tout ce qui sépare l’Europe de Tahiti, c’est-à-dire en réalité l’Europe de sa vérité enfouie à jamais, ce qui sépare l’Europe de son principe naturel. Mais se pose alors la question, cruciale, celle de savoir ce que nous, Européens, nous devons faire une fois que l’on sait que les codes auxquels nous sommes invités à faire allégeance ne sont ni naturels ni cohérents ; une fois que l’on a compris qu’en obéissant à telle ou telle loi on contredit la nature en nous, et on contredit d’autres lois auxquelles on doit pourtant obéir ? Comment agir en de telles conditions ? Quelle attitude politique en résulte ? Cette question, c’est celle de l’attitude politique qu’on peut et doit adopter dans une telle situation de crise permanente qu’est la civilisation, où les normes et les jeux de valeurs se contredisent et exigent de nous que nous mentions, que nous nous mentions à nous-mêmes et que nous mentions aux autres et que nous mentions aussi aux institutions et aux autorités chargées de les administrer. Car, écrit Diderot, assujetti à trois codes contradictoires », l’homme est contraint de les enfreindre alternativement ». Il y a là un paradoxe terrible si j’obéis aux lois, je me contredis ; si je veux ne pas me contredire, alors je ne peux pas faire autrement que désobéir aux lois. Je ne peux à la fois être fidèle à moi et respectueux des lois communes. Cette contradiction n’est pas abstraite songez aux débats que nous avons dans notre société sur la question du port du voile. Si je veux être fidèle à ma religion, j’enfreins une loi qui m’interdira de porter un voile en public ; si je veux obéir à la loi, je dois renoncer à mes convictions qui m’enjoignent de le faire. Dans tous les cas je serai en contradiction. C’est ce problème que posent A et B dans la dernière partie du Supplément. La contradiction des codes met en contradiction l’action et son principe. Que doit-on faire dans ce cas ? Obéir aux lois et renoncer à soi ? Ou faire prévaloir son intégrité et enfreindre les lois, mais au risque de rendre la vie commune impossible ? On le voit, le problème n’est pas de choisir entre l’état de nature et l’état civilisé il est de savoir si je privilégie mon être personnel en m’élevant contre la société ou si je me coule dans celle-ci au risque de me perdre moi. Il ne peut être question de revenir à la nature puisque celle-ci est perdue dès que la civilisation s’en empare — Tahiti n’est plus Tahiti ; et il est aussi impossible d’aller vivre à Tahiti que d’être tahitien à Paris. La seule solution politique est peut-être d’assumer la 9 contradiction, de respecter les lois mais aussi, en même temps, de travailler à les réformer de façon à amoindrir la contradiction, à en atténuer les inconvénients, à soulager les douleurs d’une conscience travaillée par la division et d’une société divisée par ses contradictions. Mais comment ? Vous verrez ce que proposent A et B à la fin du dialogue. L’aumônier, par la conduite à laquelle il a dû se résoudre, donne peut-être l’exemple d’une attitude politique, étrange apparemment mais pourtant rigoureuse Prendre le froc du pays où l’on va et garder celui du pays où l’on est », c’est-à-dire être aumônier à Paris et tahitien à Tahiti, soit donc, se défroquer lorsque les lois de l’hospitalité l’exigent, renoncer à ses vœux à ses valeurs, à ses convictions, si cela est requis pour la paix publique et l’utilité commune. Se défroquer, qu’est-ce à dire ? pour un homme d’église, cela revient à renoncer à ses engagements envers Dieu et à quitter son état » de prêtre, à revenir à la vie civile. Et donc pour notre aumônier, être prêtre à Paris, civil à Tahiti quand il s’agit d’honorer les filles d’Orou. Mais pour nous, que cela signifie-t-il ? Se défroquer, c’est changer d’habits, changer de costumes. Soit, changer d’habitudes et changer de coutumes. Savoir être soi et un autre, savoir porter tel habit ici à tel moment et tel autre à tel autre moment ou en tel autre lieu. Savoir être soi mais aussi savoir se défaire de soi, se faire autre, s’ouvrir aux autres, à leurs coutumes et à leurs habitudes, bref se faire Tahitien quand cela est requis. Que signifie ce jeu de rôle ? Est-ce mensonge, duperie, hypocrisie ? En situation de crise, l’hypocrisie serait-elle requise ? Est-elle la condition nécessaire pour qu’une vie avec les autres, une vie publique, soit possible ? Ou doit-on réfléchir à un autre sens de l’hypocrisie Hypokrites, comme vous savez, c’est le nom qu’en grec ancien, on donnait au comédien. C’est peut-être là le secret, être comédien, acteur. Etre acteur, c’est-à-dire être celui qui joue son rôle mais être aussi l’homme des actions, celui qui s’en tient strictement à ses actions physiques sans se soucier des idées morales qu’on y attache. Mais l’acteur qui joue son rôle est aussi celui qui raconte des histoires, qui ne dit pas ce qu’il pense, et qui fait, en revanche, ce qu’on attend de lui qu’il fasse. Tout acteur est double, lui et son personnage. Et il pense peut-être le contraire de ce qu’il dit ou fait. Est-ce une solution ? Ou une piste pour une solution ? Je ne sais pas. Qu’en dit Diderot ? Lisons les derniers échanges de A et de B, ils parlent des femmes. Et je vous laisse penser ce qu’il faut, à votre avis, en penser. B. … Imitons le bon aumônier, moine en France, sauvage dans Tahiti. A. Prendre le froc du pays où l’on va, et garder celui du pays où l’on est. B. Et surtout être honnête et sincère jusqu’au scrupule avec des êtres fragiles qui ne peuvent faire notre bonheur sans renoncer aux avantages les plus précieux de nos sociétés. Et ce brouillard épais, qu’est-il devenu ? A. Il est retombé. B. Et nous serons encore libres, cet après-dîner, de sortir ou de rester ? A. Cela dépendra, je crois, un peu plus des femmes que de nous. B. Toujours les femmes ! On ne saurait faire un pas sans les rencontrer à travers son chemin. A. Si nous leur lisions l’entretien de l’aumônier et d’Orou ? B. A votre avis, qu’en diraient-elles ? A. Je n’en sais rien. B. Et qu'en penseraient-elles ? A. Peut-être le contraire de ce qu’elles en diraient. » 10 Contactlescoursjulien Supplément au voyage de Bougainville, le discours du vieillard », Diderot, 1796 Pleurez, malheureux Tahitiens! pleurez; mais que ce soit de l’arrivée, et non du départ de ces hommes ambitieux et méchants un jour, vous les connaîtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voyez attaché à la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au côté de celui-là, dans l’autre, vous enchaîner, vous égorger, ou vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices; un jour vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu’eux. Mais je me console; je touche à la fin de ma carrière; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point. O Tahitiens! mes amis! vous auriez un moyen d’échapper à un funeste avenir; mais j’aimerais mieux mourir que de vous en donner le conseil. Qu’ils s’éloignent, et qu’ils vivent. » Puis s’adressant à Bougainville, il ajouta Et toi, chef des brigands qui t’obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive nous sommes innocents, nous sommes heureux; et tu ne peux que nuire à notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature; et tu as tenté d’effacer de nos âmes son caractère. Ici tout est à tous; et tu nous as prêché je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes; tu as partagé ce privilège avec nous; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras; tu es devenu féroce entre les leurs. Elles ont commencé à se haïr; vous vous êtes égorgés pour elles; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres; et voilà que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage. Tu n’es ni un dieu, ni un démon qui es-tu donc, pour faire des esclaves? Orou! toi qui entends la langue de ces hommes-là, dis-nous à tous, comme tu me l’as dit à moi, ce qu’ils ont écrit sur cette lame de métal Ce pays est à nous. Ce pays est à toi! et pourquoi? parce que tu y as mis le pied? Si un Tahitien débarquait un jour sur vos côtes, et qu’il gravât sur une de vos pierres ou sur l’écorce d’un de vos arbres Ce pays appartient aux habitants de Tahiti, qu’en penserais-tu?… Tu n’es pas esclave tu souffrirais la mort plutôt que de l’être, et tu veux nous asservir! Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas défendre sa liberté et mourir? Celui dont tu veux t’emparer comme de la brute, le Tahitien est ton frère. Vous êtes deux enfants de la nature; quel droit as-tu sur lui qu’il n’ait pas sur toi? Tu es venu; nous sommes-nous jetés sur ta personne? avons-nous pillé ton vaisseau? t’avons-nous saisi et exposé aux flèches de nos ennemis? t’avons-nous associé dans nos champs au travail de nos animaux? Nous avons respecté notre image en toi. Laisse nous nos moeurs; elles sont plus sages et honnêtes que les tiennes; nous ne voulons plus troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons. Sommes-nous dignes de mépris, parce que nous n’avons pas su nous faire des besoins superflus? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir. Tu es entré dans nos cabanes, qu’y manque-t-il, à ton avis? Poursuis jusqu’où tu voudras ce que tu appelles les commodités de la vie; mais permets à des êtres sensés de s’arrêter, lorsqu’ils n’auraient à obtenir, de la continuité de leurs pénibles efforts, que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l’étroite limite du besoin, quand finirons-nous de travailler? Quand jouirons-nous? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journalières la moindre qu’il était possible, parce que rien ne nous paraît préférable au repos. Va dans ta contrée t’agiter, te tourmenter tant que tu voudras; laisse-nous reposer ne nous entête ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimériques. » Exemple d’un plan de commentaire avec introduction et conclusion du passage le discours du vieillard » dans supplément au voyage de Bougainville de Diderot, 1796. Ceci n’est pas un modèle, mais un exemple. Votre réflexion personnelle peut évidemment mener à d’autres pistes de lecture Introduction La parution du livre est posthume en 1796. Diderot a entrepris l’écriture du Supplément au voyage de Bougainville suite au succès du réel récit de voyage de l’explorateur, Voyage autour du monde 1771. Le livre, comme l’indique le titre complet, se présente sous la forme d’un dialogue entre deux personnages A et B, qui se réfère à l’oeuvre de Bougainville pour mieux interroger le lecteur sur la colonisation et la vision européenne portée sur ces terres éloignées. accroche avec remise dans le contexte A l’intérieur de ce dialogue philosophique, fréquent dans l’oeuvre du philosophe Entretien avec la Maréchale de…, ou Jacques le faliste, deux récits sont enchâssés l’entretien de l’aumonier et Orou, et les adieux du vieillard. Ce dernier se situe au début, dans le deuxième chapitre. Un vieil homme, respecté pour sa sagesse, et semblant être le chef de la tribut des Otaïtiens, détaille avec colère les méfaits des colons, et l’injustice de la colonisation dans un long discours. présentation du texte Quel regard est porté sur la civilisation européenne dans cet extrait par le philosophe ? problématique Nous montrerons dans un premier temps que ce texte est un discours argumentatif, puis nous analyserons la portée philosophique du propos, notamment dans la comparaison effectuée entre les deux mondes. annonce de plan introduction en quatre parties avec une accroche, une présentation du passage, une problématique, et une annonce de plan. I- Un discours polémique. phrase d’introduction avec rappel du thème lors de la rédaction a Les marques du discours. s’adresse directement à Bougainville Puis s’adressant à Bougainville ». Seconde personne du singulier tout au long du texte Et toi », tu ne peux »…, marque d’un manque de respect pour le colonisateur. il parle au nom de son peuple Nous suivons », et à son peuple, qui avec Bougainville, constitue son auditoire. Présence de procédés oratoires comme de multiples questions rhétoriques. b Une tonalité polémique. le vieillard ne débat pas avec Bougainville. Il est énervé ponctuation expressive et tu veux nous asservir ! », impératif Laisse-nous ». formulations insultantes à plusieurs reprises chef des brigands », brute ». colère du vieillard devant les comportements des Occidentaux décrits en termes violents féroce », vous vous êtes égorgés pour elles ». c Un discours argumentatif. un discours structuré malgré la colère tout d’abord, la situation initiale, le vaisseau proche de la rive. Ensuite, seconde étape sur la propriété Ici tout est à tous », puis la liberté Nous sommes libres », enfin, le second paragraphe expose plus en détail le mode de vie des Thaitiens, tu es entré dans nos cabanes ». utilisation d’un présent de vérité générale, qui ne souffre pas de contestation Tu n’es ni un dieu, ni un démon », Tout ce qui est nécessaire et bon, nous le possédons ». connecteurs logiques et » répétitions dans le texte », donc », Lorsque ».. convaincre par l’exemple, et la logique du raisonnement, persuader par la tonalité polémique. phrase de conclusion/transition lors de la rédaction de la partie II- Un discours des Lumières. phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction a Un blâme de la colonisation. description péjorative de la colonisation. Un vol Ce pays est à nous. Ce pays est à toi ! Et pourquoi ? Parce que tu y as mis le pied ? ». La colonisation est montrée comme une appropriation illégitime, faite par la violence, par la force. La violence vous enchaîne, vous égorge », mise en avant du symbole de la supériorité guerrière des Européens le fer qui pend au côté de celui-là », cette lame de métal », l’épée. La privation de liberté le titre de notre futur esclavage », esclaves », tu veux nous asservir », défendre nitre liberté ». un vol violent et un asservissement pour des buts néfastes vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices », aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu’eux », énumération insistant sur le caractère nocif de la civilisation européenne. b L’utopie tahitienne. principe de tolérance en mettant en avant les caractéristiques de la civilisation thaïtienne. Présent de vérité générale pour décrire leur état, leur vie Nous sommes innocents, nous sommes heureux », Nous sommes libres ». Bonheur et liberté sont acquis. Le nous » inclus tous les habitants ; société égalitaire. Pas de besoins, apparence d’une société sans manques Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons ». pas de propriété Ici, tout est à tous. », pas de mariage Nos femmes et nos filles sont nous sont communes ». Idée d’une communauté utopique. c Une vision typique de Diderot. matérialisme athée de Diderot mis en avant pas de liens familiaux sacrés, insistance sur les conditions de vie, refus de la propriété. Vie et bonheur qui suivent les lois naturelles Nous suivons le pur instinct de la nature », parallélismes simples pour exprimer une vie simple Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger… ». Travail et progrès sont vues comme des valeurs négatives rien ne nous parît préférable au repos », tes inutiles lumières », tes besoins factices ». retournement de situation par rapport au cliché de l’indigène sauvage et peu développé, et de l’Européen progressiste et savant. phrase de conclusion de la partie lors de la rédaction Conclusion La forme du texte est celle du discours, qui permet à la fois de faire passer des sentiments de colère contre la colonisation européenne, et un raisonnement logique qui nous montre les désordres créés par la colonisation dans les sociétés indigènes. Le discours interroge aussi le lecteur sur la légitimité des Européens à s’accaparer des terres à l’autre bout du monde. De plus, Diderot pose ,par une comparaison habile entre une civilisation européenne corrompue et une civilisation thaïtienne heureuse et épanouie, les principes de sa philosophie proche de la nature, et égalitaire. réponse à l’annonce de plan La colonisation européenne est vue comme une malédiction terrible, qui opprime les peuples indigènes. Elle ment sur sa légitimité, sur la promesse de progrès qu’elle avance, car les Européens ne peuvent apporter le bonheur à une civilisation qui le possède déjà. réponse à la problématique Ce texte nous renseigne une nouvelle fois sur la proximité philosophique de Diderot et de Rousseau quant aux lois naturelles, et à la vision du travail et du progrès. Les deux philosophes souhaitent un retour des civilisés » à une vie primitive, déliée des besoins superflus, et surtout sans propriété, comme l’expose aussi Rousseau dans le mythe du bon sauvage. ouverture conclusion en trois parties avec reprise des conclusions partielles, réponse à la problématique, et ouverture contactlescoursjulien Project Gutenberg's Supplement au Voyage de Bougainville, by Denis Diderot This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at Title Supplement au Voyage de Bougainville Author Denis Diderot Posting Date November 9, 2012 [EBook 6501] Release Date September, 2004 First Posted December 24, 2002 Language French *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK SUPPL. AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE *** Produced by Claude Decoret and Laurent de Guillou SUPPLÉMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE CHAPITRE I - JUGEMENT DU VOYAGE DE BOUGAINVILLE ———————————————————————- A. Cette superbe voûte étoilée, sous laquelle nous revînmes hier, et qui semblait nous garantir un beau jour, ne nous a pas tenu parole. B. Qu'en savez-vous ? A. Le brouillard est si épais qu'il nous dérobe la vue des arbres voisins. B. Il est vrai ; mais si ce brouillard, qui ne reste dans la partie inférieure de l'atmosphère que parce qu'elle est suffisamment chargée d'humidité, retombe sur la terre ? A. Mais si au contraire il traverse l'éponge, s'élève et gagne la région supérieure où l'air est moins dense, et peut, comme disent les chimistes, n'être pas saturé ? B. Il faut attendre. A. En attendant, que faites­vous ? B. Je lis. A. Toujours ce voyage de Bougainville ? B. Toujours. A. Je n'entends rien à cet homme­là. L'étude des mathématiques, qui suppose une vie sédentaire, a rempli le temps de ses jeunes années ; et voilà qu'il passe subitement d'une condition méditative et retirée au métier actif, pénible, errant et dissipé de voyageur. B. Nullement. Si le vaisseau n'est qu'une maison flottante, et si vous considérez le navigateur qui traverse des espaces immenses, resserré et immobile dans une enceinte assez étroite, vous le verrez faisant le tour du globe sur une planche, comme vous et moi le tour de l'univers sur notre parquet. A. Une autre bizarrerie apparente, c'est la contradiction du caractère de l'homme et de son entreprise. Bougainville a le goût des amusements de la société ; il aime les femmes, les spectacles, les repas délicats ; il se prête au tourbillon du monde d'aussi bonne grâce qu'aux inconstances de l'élément sur lequel il a été ballotté. Il est aimable et gai c'est un véritable Français lesté, d'un bord, d'un traité de calcul différentiel et intégral, et de l'autre, d'un voyage autour du globe. B. Il fait comme tout le monde il se dissipe après s'être appliqué, et s'applique après s'être dissipé. A. Que pensez­vous de son Voyage ? B. Autant que j'en puis juger sur une lecture assez superficielle, j'en rapporterais l'avantage à trois points principaux une meilleure connaissance de notre vieux domicile et de ses habitants ; plus de sûreté sur des mers qu'il a parcourues la sonde à la main, et plus de correction dans nos cartes géographiques. Bougainville est parti avec les lumières nécessaires et les qualités propres à ses vues de la philosophie, du courage, de la véracité ; un coup d'oeil prompt qui saisit les choses et abrège le temps des observations ; de la circonspection, de la patience ; le désir de voir, de s'éclairer et d'instruire ; la science du calcul, des mécaniques, de la géométrie, de l'astronomie ; et une teinture suffisante d'histoire naturelle. A. Et son style ? B. Sans apprêt ; le ton de la chose, de la simplicité et de la clarté, surtout quand on possède la langue des marins. A. Sa course a été longue ? B. Je l'ai tracée sur ce globe. Voyez­vous cette ligne de points rouges ? A. Qui part de Nantes ? B. Et court jusqu'au détroit de Magellan, entre dans la mer Pacifique, serpente entre ces îles qui forment l'archipel immense qui s'étend des Philippines à la Nouvelle­Hollande, rase Madagascar, le cap de Bonne­Espérance, se prolonge dans l'Atlantique, suit les côtes d'Afrique, et rejoint l'une de ses extrémités à celle d'où le navigateur s'est embarqué. A. Il a beaucoup souffert ? B. Tout navigateur s'expose, et consent de s'exposer aux périls de l'air, du feu, de la terre et de l'eau mais qu'après avoir erré des mois entiers entre la mer et le ciel, entre la mort et la vie ; après avoir été battu des tempêtes, menacé de périr par naufrage, par maladie, par disette d'eau et de pain, un infortuné vienne, son bâtiment fracassé, tomber, expirant de fatigue et de misère, aux pieds d'un monstre d'airain qui lui refuse ou lui fait attendre impitoyablement les secours les plus urgents, c'est une dureté !… A. Un crime digne de châtiment. B. Une de ces calamités sur lesquelles le voyageur n'a pas compté. A. Et n'a pas dû compter. Je croyais que les puissances européennes n'envoyaient pour commandants dans leurs possessions d'outre­mer, que des âmes honnêtes, des hommes bienfaisants, des sujets remplis d'humanité, et capables de compatir… B. C'est bien là ce qui les soucie ! A. Il y a des choses singulières dans ce voyage de Bougainville. B. Beaucoup. A. N'assure­t­il pas que les animaux sauvages s'approchent de l'homme, et que les oiseaux viennent se poser sur lui, lorsqu'ils ignorent le péril de cette familiarité ? B. D'autres l'avaient dit avant lui. A. Comment explique­t­il le séjour de certains animaux dans des îles séparées de tout continent par des intervalles de mer effrayants ? Qui est­ce qui a porté là le loup, le renard, le chien, le cerf, le serpent ? B. Il n'explique rien ; il atteste le fait. A. Et vous, comment l'expliquez­vous ? B. Qui sait l'histoire primitive de notre globe ? Combien d'espaces de terre, maintenant isolés, étaient autrefois continus ? Le seul phénomène sur lequel

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